Comment gérer ses émotions ?

Il est parfois difficile de dompter ses émotions en plein effort sportif. Colère, peur, joie... tout peut arriver sur un terrain. Mais comment faire pour les contrôler ? Sylvain Baert, spécialiste en la matière, vous éclaire.

 

Il n'est pas rare de voir un sportif pleurer après un échec ou une chute. Kévin Mayer en est l'une des preuves récentes. Il a raté ses trois essais à l'épreuve du saut en longueur au décathlon lors des championnats d'Europe d'athlétisme à Berlin. Différentes émotions traversent les sportifs au cours d'un effort sportif, qu'ils soient professionnels ou non. Le docteur Sylvain Baert, spécialiste en préparation mentale, relaxation et sophrologie, vous explique par quels moyens il est possible de contrôler ses émotions.

Mais en fait, c'est quoi une émotion  ?

Pour beaucoup, il est difficile d'identifier ce qu'est véritablement une émotion. Et figurez-vous, même les spécialistes peinent à définir correctement ce terme. Émotion, sentiment, affect, on a tendance à tout mélanger. Mais de quoi parle-t-on ?

D'une manière plus générale, l'affect « inclut tous les concepts comme les émotions, les humeurs, les sentiments, les préférences, etc » selon Bernard Rimé, chercheur et référent actuel dans le domaine. Bien que l'utilisation de ces termes reste encore floue et qu'il n'existe pas de "code de la route", les spécialistes semblent s'accorder sur quelques points. D'après Lazarus, « l'émotion se définit comme étant une réaction psychophysiologique organisée à des relations interpersonnelles ou sociales avec l'environnement » avant que Cox n'ajoute : « l'émotion est une réaction soudaine à une situation de quelques secondes, quelques minutes ou quelques heures ». 

Pour vulgariser, une émotion regroupe tout ce genre de ressentis psychologiques mais aussi physiologiques dans la mesure où l'on va ressentir une certaine intensité à l'intérieur de notre corps. Cela peut être de la joie, de la tristesse, de la colère...

Pourquoi réagit-on différemment que le voisin ?

En fait, il existe différents types d'émotions. Il y a celles qui sont dynamisantes et d'autres désagréables qui peuvent devenir toxiques sur le long terme. En fonction de notre personnalité, de notre parcours et de notre expérience, on va avoir tendance à développer plus les unes que les autres. « C'est une sorte de câblage neurologique que l'on peut modifier avec un entraînement mental spécifique, explique Sylvain Baert. C'est comme un quotient émotionnel qui peut se travailler ». 

« Cette intelligence émotionnelle fait référence à la capacité à identifier, comprendre, gérer et exprimer nos émotions. Un sportif intelligent émotionnellement, c'est quelqu'un qui est capable de prendre conscience de ses émotions et de savoir les contrôler mais aussi de savoir capter et gérer celles des autres ». 

Comment mieux gérer ses émotions ?

Et bien oui, c'est souvent plus facile à dire qu'à faire ! Vous connaissez forcément quelqu'un qui a tendance à s'énerver davantage lorsqu'il sait qu'il est énervé, n'est-ce pas ? Ou peut-être même que cela vous est déjà arrivé. En revanche, il existe de nombreuses techniques pour appréhender plus facilement ce genre d'émotions. Idem si vous avez l'habitude de perdre tous vos moyens avant une compétition importante. « Chaque sportif est capable de basculer consciemment ses émotions dites "négatives" en émotions agréables ». 

Plusieurs techniques, sur du long terme, vont vous permettre de recalibrer vos émotions et d'autres, plus spécifiques, peuvent être adaptées quasiment au moment T. Le spécialiste vous guide. « Les méthodes les plus connues sont la relaxation, la sophrologie, la respiration et la cohérence cardiaque et la méditation de pleine conscience. Il faut partir sur une durée d'environ 8 semaines à raison d'une séance quotidienne de 20 minutes. Le mieux est de tester plusieurs techniques ». 

Pour des méthodes "d'urgence", comme la veille d'une compétition par exemple, on privilégiera des techniques très efficaces et rapides de 30 secondes à 1 minute. « On peut utiliser la désignation des affects. Elle s'élabore en 4 étapes : on s'isole, on respire profondément et consciemment, on localise le ressenti de l'émotion dans notre corps en fermant les yeux et enfin, on va nommer mentalement l'émotion éprouvée. Par exemple, on dit "je ressens de la colère". Une pédale de frein au niveau du cerveau va venir atténuer cette intensité émotionnelle ». Et comme pour tout, cela sera efficace en répétant l'exercice.

Il y a aussi la visualisationl'EFT (Emotional Freedom Technique) qui est une sorte de tapping avec les doigts pour venir stimuler des points clés au niveau du visage et du crâne. C'est très rapide et il permet par exemple de gérer le stress d'un sportif en 10 minutes. Idéal avant de perdre vos moyens sur la ligne de départ, non ? Mais attention, ce n'est pas une solution magique. Un entraîner régulier et progressif permet à terme d'avoir une certaine flexibilité de gestion des émotions "négatives". « Il y a aussi le concept PEAR, qui signifie Pensée, Émotion, Action et Résultat. C'est comme le dialogue interne. L'idée est que l'évaluation cognitive d'une action va entraîner des émotions, qui elles-mêmes vont entraîner un comportement, propice ou non à la performance. Pour faire vite, si vous pensez à quelque chose que vous aimez bien, cela va vous procurer des émotions agréables. Et inversement », indique le spécialiste.

Le sport procure des émotions mais permet aussi d'en canaliser

Pas toujours facile, donc, de gérer sa peur, son stress, sa colère lors d'épreuves sportives, qui plus est lorsque l'enjeu est de taille. Le sport peut donc être à la fois un moyen de ressentir des émotions mais à l'inverse, il peut aussi permettre d'en gérer d'autres. C'est une sorte « d'échappatoire ».

« Généralement, quand l'on fait du sport, on recherche des émotions agréables. Cela peut effectivement être un moyen de gérer les émotions désagréables que l'on a ressenti dans la journée. C'est un bon moyen de basculer vers un bien-être », conclut Sylvain Baert. 

LA16 (RADIO LOCALE)